"Le rôle et le statut de la ville dans l’oeuvre d’Ismail Kadaré" par Jean-Paul Champseix
L’association Albania a organisé, jeudi 18 février 2010, une rencontre débat avec Jean-Paul Champseix, enseignant à l’université de Paris 12.
Auteur de plusieurs ouvrages sur l’Albanie ("57 bd Staline" et "L’Albanie, la logique du désespoir") et de nombreux articles littéraires sur l’oeuvre d’Ismail Kadaré, il a également publié une thèse intitulée "Stratégie littéraire et idéologique contre le réalisme socialiste dans l’oeuvre de Kadaré" soutenue en 2000.
Dans son intervention, J. P. Champseix a souligné le fait que si Kadaré est considéré aujourd’hui comme le représentant ou l’incarnation de son pays, son rapport à l’Albanie n’a pour autant rien d’un romantisme naïf. Kadaré se donne comme le contraire d’un auteur folklorique.
Il nous offre une vision très personnelle et intellectuelle de l’Albanie et cela s’exprime parfaitement bien à travers l’étude de l’image de la ville dans son œuvre.
De la "ville flottante", aux contours flous et sans caractère, à la ville natale bien déterminée-Gjirokastër, la ville est un repère dans la brume. Elle protège d’une nature hostile ; la terre est inhospitalière, les montagnes sont des lieux d’inquiétude, d’étrangeté, des étendus stériles qui secrètent le drame, telles les Cimes Maudites d’ « Avril brisé ».
Même si la ville peut être représentée en termes d’excès, défiant l’apesanteur, l’histoire et le nouveau régime communiste, telle Gjirokastër, de « Chronique de la ville de pierre », ou de « Dîner de trop », c’est ce même excès qui s’avère très formateur pour le futur écrivain, car cela forge sa mentalité et pose les bases de son esthétique.
La ville est aussi une citadelle assiégée qui par sa résistance même attire des ennemies divers. Les Ottomans, dans « Les tambours de la pluie », l’empire soviétique dans « Le grand hiver », car elle échappe au présent et à la volonté des différents régimes politiques, rendant impossible toute table rase. Comme J.P. Champseix le souligne, Kadaré fonde la valeur d’un pays dans l’ancienneté de son histoire. Nous retrouvons ici la dualité centrale entre Orient et Occident, Istanbul, Moscou, Pékin contre Tirana, Paris.
Dans « Le monstre », la ville provoque l’ivresse destructrice des jeunes protagonistes et rend tangible la notion de terreur politique. Mais elle peut aussi prendre les traits d’une femme : d’une fille de la maison de tolérance, dans « Le général de l’armée morte », ou d’une grande dame, belle, altière, d’une blancheur aveuglante, dans « Chronique de la ville de pierre ».
Autre image importante et une de plus marquantes, la ville-pieuvre. La ville totalitaire du « Palais des rêves », avec ses archives qui se substituent au monde, qui sont le monde.
J. P Champseix rapproche l’univers de Kadaré de celui de Borges et Kafka. Ainsi, sous ses différentes représentations, la ville reste un élément fondamental de l’imagerie « kadaréenne ».
Ornela TODORUSHI
Lire également : Albania : rencontre avec Helena KADARE
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