Albania

STUDIA KADAREIANA, ALBANICA ET HUMANITATIS

avec Jean-Paul Champseix, spécialiste de l’oeuvre de Kadaré

vendredi 9 décembre 2016 par en , E. Noygues

Le Département de Lettres de la Faculté d’Histoire et de Philologie de Tirana organise une conférence scientifique In Honorem Ismail Kadaré sur l’oeuvre de l’écrivain. Placée sous la direction du Prof.Asoc.Dr. Lili Sula, cette rencontre est conçue comme une incitation à approfondir l`étude ultérieure de la diversité de son oeuvre et un point de départ pour hausser les études sur Kadaré a de plus hauts niveaux scientifiques.

L’oeuvre d’Ismail Kadaré, malgré la gamme de 5000 monographies et d’écrits à caractère d`études, a encore des traits, des couches significatives, des poétiques et des oeuvres qui n’ont pas encore été analysées dans leur originalité. Pendant un demi siècle elle a fonctionné sous de différents horizons d’attente, dans l`espace de la langue albanaise et de 45 autres langues.

De nos jours, les lecteurs des nouvelles générations, ayant une culture et une communication plus ouverte dans le pays et à l`étranger, les chercheurs et les professeurs ayant une formation littéraire et scientifique plus large, se trouvent dans un plus haut horizon d`attente.

A l’occasion de cette conférence qui prendra la forme de plusieurs ateliers de discussion avec des professeurs, des écrivains, des cinéastes, des metteurs en scène de théâtre ainsi que d’une table-ronde. Jean-Paul Champseix, professeur agrégé de lettres modernes, docteur en sémiotique littéraire, présente une communication sur l’oeuvre de Kadaré.

Jean-Paul Champseix : "Quand l’auteur se risque à devenir personnage"

Dans l’Albanie d’Enver Hoxha, on n’écrivait que sur les héros morts et dûment adoubés. Le tyran, lui-même, a découragé toutes les tentatives de ses admirateurs de faire une biographie sur lui. Que dire alors de l’autobiographie ? Elle était interdite car elle incarnait la pire manifestation d’un ego individualiste et narcissique. Kadaré s’y risque pourtant, à deux reprises, dans « Chronique de pierre » et « Le Crépuscule des dieux de la steppe ». Ce n’est pas fortuit.

Dans le premier roman, la vision d’un enfant, au cours de la guerre, permet d’esquiver le discours idéologique convenu et de dire ce qui compta vraiment pour lui. Au travers de cet enfant, Kadaré opère une distinction qui constitue un axe de son œuvre : d’un côté les événements présents et spectaculaires ; de l’autre l’Histoire longue, toute imprégnée de culture. Ce sont les « Grandes Vieilles » détachées de la vie et de la peur qui incarnent le mieux cette distance.

Alors que les principes héritées de la révolution culturelle sévissaient, l’écrivain osait évoquer les croyances et les superstitions qui structuraient la vie d’une population encore largement traditionnelle. L’ouvrage constitue ainsi un petit traité d’ethnographie fort précieux, à une époque où tout ce passé devait être balayé.

Dans le second roman, Kadaré s’implique personnellement dans une lutte explicite contre le réalisme socialiste qu’il a passé sa vie à combattre. Il profite de la rupture avec l’Union Soviétique, qualifiée de « révisionniste », pour brocarder avec violence cette doctrine stérile. D’autre part, il exprime le traumatisme de la séparation d’avec la vie moscovite qu’il aimait. Il se permet, pour dépasser son trouble, de s’incarner dans la légende de Constantin et Doruntine pour simplement oser dire adieu à la femme qu’il aime et qu’il ne reverra plus.

L’autobiographie est donc le signe d’un engagement fort et Kadaré ne voulait pas créer un personnage pour le remplacer. Certes l’enfant et l’étudiant ne sont jamais nommés… pas même la ville de Gjirokastër… mais nul n’ignore, en Albanie, de qui il s’agit.

A LIRE SUR CE SITE :
- "Le rôle et le statut de la ville dans l’oeuvre d’Ismail Kadaré" par Jean-Paul Champseix
- Albania : rencontre avec Helena KADARE

Les principales thématiques de la conférence

I.
- L’oeuvre d`Ismail Kadaré, vue dans le contexte de la littérature, de la culture albanaise et européenne. Les apports dans la littérature albanaise, dans la poésie, la narration, l`esthétique, en particulier dans le roman dans l`horizon d`attente actuel.
- Traits de la modernisation contemporaine. Rapports, caractéristiques en commun, différences avec les poétiques connues de la modernisation des autres littératures.
- Diversité des genres poétiques et de la prose Romanesque. L`originalité des poétiques, leur innovation. Analyse d`oeuvres particulières.
- La critique philologique et l`herméneutique en face de la dimension historique de son oeuvre.
- La critique pour des études, monographies en albanais et en d`autres langues, dédiées à son oeuvre.
- La richesse de l`albanais dans son oeuvre, de différents plans de ses fonctions.
- Sa place dans l`historiographie de la littérature albanaise. Les alternatives du genre de Kadaré et le canon littéraire albanais.
- Les limites idéologiques de l`attente. L`idéologisation critique entre le sociologisme et le structuralisme.
- Kadaré dans les programmes et les textes scolaires des écoles albanaises du niveau primaire à l`université.

II.
- L’oeuvre d’Ismail Kadaré dans l`horizon d`attente des autres littératures : française, allemande, italienne, anglaise, espagnole, portugaise, balkanique etc..
- Les traductions, la critique et les études étrangères sur son oeuvre
- Son oeuvre dans les programmes et les textes scolaires dans d`autres pays.
- Ismail Kadaré, l`écrivain de dimensions européennes et mondiales. Sa pensée en albanais et dans d`autres langues sur la littérature. Conversations et entretiens sur la littérature avec des écrivains et des journalistes étrangers.


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